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 banniére

Un procès exemplaire à Saintes

Vendredi, 21 Décembre, 2001
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Pour la première fois en France, une plainte pour discrimination raciale à l'encontre d'un camping n'est pas classée sans suite et aboutit à une comparution devant la justice. Sur le banc des prévenus, Jean Claude Collin, propriétaire du camping Les Chênes, à Medis, accusé de discrimination raciale et de diffamation. La première infraction date du mois de mars 2000. C'est à cette époque que le foyer Guy-Chevrot, de Laval, contacte le camping des Chênes afin de préparer les vacances des jeunes du quartier.

S OS RACISME CONTRE LE CAMPING DE MÉDIS Le propriétaire d'un camping de Medis comparaissait hier au tribunal correctionnel de Saintes pour discrimination raciale et diffamation. Le jugement a été mis en délibéré Pour l'association SOS Racisme comme pour la jurisprudence nationale, l'affaire jugée hier après-midi au tribunal correctionnel de Saintes est une première. Pour la première fois en France, une plainte pour discrimination raciale à l'encontre d'un camping n'est pas classée sans suite et aboutit à une comparution devant la justice. Sur le banc des prévenus, Jean Claude Collin, propriétaire du camping Les Chênes, à Medis, accusé de discrimination raciale et de diffamation. La première infraction date du mois de mars 2000. C'est à cette époque que le foyer Guy-Chevrot, de Laval, contacte le camping des Chênes afin de préparer les vacances des jeunes du quartier. Quelques jours plus tard, le foyer reçoit un courrier signé de Jean-Claude Collin spécifiant que leur venue est soumise à certaines conditions, dont celle-ci : le camping n'accepte pas « les groupes composés à plus de 50 % d'enfants de couleur, afin d'éviter les clans ». La seconde infraction dont est accusé M. Collin a pour objet une interview à caractère diffamatoire diffusée par nos confrères de France Bleue La Rochelle en août 2001. Pour Samuel Thomas, représentant national de SOS Racisme qui s'est portée partie civile, « la culpabilité de ce propriétaire doit être reconnue. Les cas de discrimination raciale sont multiples sur la côte atlantique et c'est la première fois que les faits ont pu être caractérisés car basés sur une preuve écrite, le courrier de M. Collin. Ce jugement doit être un message envoyé à tous les agents touristiques, qu'ils sachent que ce genre de pratiques aura désormais des conséquences juridiques car c'est un délit ». Le représentant de l'association, défendu par Me Callaud, du barreau de Saintes, a également précisé qu'il s'agissait d'un groupe de sept jeunes seulement, qui bénéficiait d'un encadrement particulièrement qualifié et nombreux. Interrogé par la présidente du tribunal, Mme Cochaud-Dutreuwe, JeanClaude Collin a expliqué qu'il avait été, par le passé, victime d'incidents dans son camping : « Des bagarres entre bandes de jeunes qui ont entraîné de gros dégâts matériels. C'est pour ça que je veux pas de groupe ». « Mais vous ne parlez pas de groupes, M. Collin, vous parlez de groupes de jeunes composés à 50 % d'enfants de couleur », insiste la présidente. « Oui, j'ai peut être analysé ça a tort mais, quand il y a différentes ethnies, ils sont moins soudés et donc mois agressifs. Ce n'est pas contre les gens de couleurs », répond le prévenu... Dans son réquisitoire, le substitut du procureur, Philippe Legrand, a rappelé que « la lutte contre la discrimination raciale est un axe fort de la politique pénale gouvernementale. On ne peut pas en même temps applaudir Zidane et refuser l'entrée d'un camping à son cousin ! Si l'on veut que les choses évoluent, il faut évidemment que les faits soient poursuivis et sanctionnés ». M. Legrand a requis une peine de prison avec sursis, à l'appréciation du tribunal, une peine d'amende proportionnelle aux ressources du prévenu, un affichage de la condamnation au camping et une publication dans « Sud Ouest » et dans « Le Monde ». Le substitut du procureur a précisé qu'il n'entendait pas faire du prévenu une victime expiatoire, mais demandait simplement « que justice soit faite ». Pour Me Lefebre, avocat saintais de la défense, c'est précisément le rôle de victime que l'on veut faire endosser à son client. «Vous êtes le cercle des vertueux, défenseur de belles idées. Oú est-on ici ? J'entends des discours spiritualistes qui n'ont rien à voir avec cette enceinte oú est rendue la justice ! M. Collin n'est pour vous qu'un numéro, il n'a même pas de nom; il est un préjugé, qui s'appelle le racisme. Depuis quand les propos qui choquent relèvent-ils du délit ? Vous ouvrez là un boulevard à la censure », s'est enflammé l'avocat. Récusant les deux infractions dont est accusé son client, il a plaidé la relaxe. Mis en délibéré, le jugement sera rendu le 24 janvier. ■

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