Le fichier en question est saisi quelques jours plus tard par un huissier, et commence alors pour SOS Racisme et la Maison des Potes une bataille judiciaire qui va durer plus de 20 ans. "Il y a eu trois non lieux dans cette affaire", détaille Samuel Thomas, à l'époque vice-président d'SOS Racisme, aujourd'hui président de la Maison des Potes. "Quatre ou cinq juges se sont succédé. Aujourd'hui, ce procès est déjà une victoire. Il faut qu'il aboutisse à une réponse forte pour condamner ces pratiques indignes."
Vingt ans après, cela n'a pas été simple de retrouver les victimes. Les noms de 500 intérimaires figuraient sur le fameux fichier. Samuel Thomas a mené un travail de fourmi pour les retrouver. Et 20 d'entre elles se sont à ce jour constitué parties civiles. Quelques-unes devraient être présentes à l'audience ce jeudi. Alamata notamment qui, 20 ans après, n'en revient toujours pas. "Ce fichage renvoie à une période de guerre, à la période de l'esclavage, je suis choquée."
Des accusations de fichage ethniques qu'Adecco a toujours rejetées, invoquant en début d'enquête, l'obligation de fournir aux clients des intérimaires qui savaient lire, écrire et compter. Nathalie, victime elle aussi, n'y croit pas. "Je suis née en France, j'ai fait mes études en France. Non, je suis Antillaise, et c'est ma couleur de peau qui leur posait problème".
Jusqu'à sept ans de prison encourus par les anciens directeurs
Depuis 1999, assure une porte-parole d'Adecco, "100% de nos collaborateurs sont sensibilisés et formés à la lutte contre les discriminations. Les recrutements sont fondés uniquement sur la compétence et les aptitudes aux postes." Elle ajoute que lors d'une enquête de "testing" menée par SOS Racisme, Adecco n'est pas apparue parmi les mauvais élèves. "L'objet de cette audience sera de vérifier l'existence et la véracité de ce fichier", poursuit-elle.
Le groupe d'intérim encourt une amende de 1,65 million d’euros. Les deux anciens directeurs d’agence risquent quant à eux 330 000 euros d’amende et sept ans de prison.