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Un gérant d'immeubles attaqué pour discrimination

Vendredi, 22 Mars, 2002
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Impeccable dans son costume, Mamadou parle fort et clair: « Dans le pays des droits de l'homme, on ne peut pas tout se permettre ». Deux ans après avoir dû quitter la résidence qu'il occupait à Toulouse, ce Sénégalais aujourd'hui naturalisé français n'a pas encore digéré. « J'ai vécu là cinq ans. Sans le moindre problème de comportement ou de paiement du loyer. Quand les propriétaires ont voulu vendre, j'ai demandé à l'agence de me trouver un autre appartement. J'ai dû remplir un dossier avec tous les papiers nécessaires. C'est là qu'ils m'ont réclamé un garant français!».

Un gérant d'immeubles attaqué pour discrimination

Impeccable dans son costume, Mamadou parle fort et clair: « Dans le pays des droits de l'homme, on ne peut pas tout se permettre ». Deux ans après avoir dû quitter la résidence qu'il occupait à Toulouse, ce Sénégalais aujourd'hui naturalisé français n'a pas encore digéré. « J'ai vécu là cinq ans. Sans le moindre problème de comportement ou de paiement du loyer. Quand les propriétaires ont voulu vendre, j'ai demandé à l'agence de me trouver un autre appartement. J'ai dû remplir un dossier avec tous les papiers nécessaires. C'est là qu'ils m'ont réclamé un garant français!».

« Il n'a pas accepté la deuxième fois ce qui était inacceptable la première », enchaîne Me Christian Etelin, partie civile pour Mamadou mais également pour SOS Racisme. A la barre du tribunal correctionnel de Toulouse, un homme de 45 ans, responsable local d'un important groupe immobilier. Il le dit d'entrée, gorge serrée: « Jamais je ne pensais, avec cette demande de garant français pour les étrangers, faire acte de discrimination. Je ne suis pas raciste. Notre but de mandataire est d'assurer la solvabilité du locataire et de s'assurer, en cas d'impayés, de pouvoir recouvrir les dettes ».

1 % D'ETRANGERS

Un élément repris par son avocat dans sa plaidoirie. « Il existe une difficulté réelle, objective, de récupérer des sommes quand le locataire part à l'étranger, même dans un pays membre de la Communauté européene », insiste Me Marc Authamayou. Sans doute. Mais aux yeux de la partie civile, comme du parquet, cette garantie particulière réclamée aux étrangers par cette société de gérance immobilière constitue une discrimination. « Une distinction pas objective et une discrimination indirecte. La meilleure preuve réside dans la modification des contrats. Elle a été effective dès le dépôt de plainte de mon client », insiste Me Etelin.

La société n'a en effet pas attendu une éventuelle condamnation pour retirer de ses contrats cette demande de garant français pour les étrangers. Et depuis janvier, le législateur l'a déclaré hors la loi. « Sur un parc de 4.000 lots, dont des locaux professionnels, nous avons 136 contrats de location qui concernent des étrangers », avance, un peu maladroit, le responsable de l'entreprise immobilière. L'argument lui revient comme un boomerang. « Cela représente moins d'1 % de votre parc locatif. Pourtant, Toulouse compte 10 % d'étrangers... », calcule Samuel Thomas, vice- président national de Sos Racisme. Son association réclame des dommages et intérêts (3.000 euros), comme Mamadou (8.000 euros).

RELAXE RECLAMEE

Au nom du parquet, la procureur Bernadette Duhaa a requis une amende et a demandé que les faits soient requalifiés en complicité de discrimination. « Puisque le prévenu a appliqué une consigne nationale. Le président directeur général devrait être à ses côtés aujourd'hui ». La défense a, elle, plaidé la relaxe. « Parce que nous n'avons jamais refusé de louer, nous avons simplement demander une garantie », estime Me Authamayou qui s'interroge également sur l'élément intentionnel de l'infraction. « Il n'existe pas. Le seul souci de la société, c'est d'assurer le bon paiement des loyers pour ses propriétaires ».

Le tribunal s'est donné le temps de réfléchir. Délibéré au 25 avril.

Jean COHADON

 

De la peur des propriétaires à la réalité des ghettos

Un propriétaire qui, entre deux locataires potentiels, éloigne immédiatement un Antillais. Une autre qui prévient l'agence immobilière: « Pas d'Arabe!». A Toulouse, les agents immobiliers sont souvent confrontés à ce type de difficultés. « Le nier serait mentir, estime une commerciale. Les propriétaires font des amalgames. Ils lient le Maghreb à la délinquance et à l'insécurité. Les Blacks à la fête et au bruit. Ils n'en veulent pas, même quand ils présentent de sérieuses références. Alors quand ils sont au chômage, cela devient impossible ».

Une réalité qui n'échappe pas à Sos Racisme, qui lutte depuis plusieurs années contre les discriminations raciales et ethniques dans l'accès au logement. L'association vient d'ailleurs de déposer un rapport au secrétariat d'Etat au Logement. « En plaçant des barrières qui bloquent l'accès aux logements, par exemple dans le centre des grandes villes, on contribue au développement des ghettos sociaux qui deviennent des ghettos tout court comme La Reynerie à Toulouse », estime Samuel Thomas, vice-président national de SOS Racisme.

Pour lutter contre cette discrimination, le secrétariat d'Etat au Logement a annoncé hier la prochaine publication de brochures d'informations destinées aux personnes susceptibles d'être victimes de ces discriminations. L'une sera destinée aux locataires d'HLM, l'autre aux locataires de logements privés

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