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Non-lieu inique pour le " tri ethnique "

Jeudi, 24 Juillet, 2003
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Mettre les Blancs dans un bloc, les Noirs dans un autre, les Maghrébins dans un troisième et les Jaunes dans le dernier n'est pas discriminatoire, selon la justice.

 

Journal l'Humanité
Rubrique Société
Article paru dans l'édition du 24 juillet 2003.

 

Prisons
Non-lieu inique pour le " tri ethnique "

Mettre les Blancs dans un bloc, les Noirs dans un autre, les Maghrébins dans un troisième et les Jaunes dans le dernier n'est pas discriminatoire, selon la justice.

Le tri ethnique, à la prison de la Santé, n'est pas discriminatoire : telle est la conclusion du juge d'instruction du tribunal de grande instance de Paris, statuant sur une plainte, déposée en 2000, par SOS Racisme. À la Santé, en effet, les détenus étrangers représentent 60 % de la population carcérale. Les " Occidentaux " sont dans le bloc A, les ressortissants d'Afrique noire (30 % des étrangers) dans le bloc B, les Maghrébins (50 %) dans le bloc C et le reste du monde dans le bloc D. Cette partition ségrégative avait déjà été dénoncée, en 1997, par le Haut Conseil à l'Intégration et, en 2000, par le rapport du Comité européen pour la prévention de la torture.

SOS Racisme se fondait aussi sur la sous-représentation du culte musulman par rapport aux autres religions et sur l'état de délabrement des autres blocs en opposition au bloc A. Le témoignage de Marie Lauras, pour le Syndicat national de l'ensemble des personnels de l'administration pénitentiaire FSU, précisait, en outre, que des Antillais sont affectés au bloc B, alors qu'ils sont de nationalité française, et que des Français, dont les ascendants étaient algériens ou marocains, ne sont pas musulmans et ne parlent pas l'arabe, sont envoyés au bloc C. Lors de son audition, Alain Jégo, ancien directeur de la Santé, précisait que les travaux des blocs B, C et D avaient été terminés en septembre 2002 et que les conflits à caractère raciste n'étaient pas courants.

Par ailleurs, il justifiait ce qu'il refuse " catégoriquement " de nommer " tri ethnique " : " Il est apparu nécessaire de gérer la diversité de cette population de façon spécifique pour aboutir à un équilibre satisfaisant de la détention. Nous avons donc pris soin, mes prédécesseurs et moi-même, de répartir les détenus de façon à éviter de mettre ensemble des personnes qui ne s'entendaient pas en raison de modes de vie complètement différents... ". À quoi Marie Lauras répondait : " Il semble paradoxal de travailler autour de l'idée de réinsertion, et donc de retour dans la société française, prônant l'intégration et non le communautarisme, et, au sein même d'un établissement public, de faire prévaloir l'idée d'une incapacité des personnes de cultures différentes à vivre ensemble. " Il est à noter qu'aucune plainte n'a émané des détenus. Selon des témoignages, ces regroupements seraient " sécurisants ".

" Ce système de répartition géographique des détenus, a conclu le juge, ne génère pas, en soi, la privation de droits pour une catégorie particulière de personnes, ce qui serait constitutif d'une discrimination au sens du code pénal. " Non-lieu, donc, contre lequel SOS Racisme fait appel : " L'objet de notre plainte est de faire cesser le tri ethnique, rappelle son vice-président, Samuel Thomas. Partir du principe que des personnes d'origines différentes ne peuvent pas se mélanger est un aveu de faiblesse de l'État face au racisme. On favorise la formation de bandes ethniques qui n'existaient pas, alors qu'on essaie d'éviter cela dans les cités. "

Quant au syndicat FSU, il préconise que des détenus étrangers qui souhaitent être en cellule avec des compatriotes en aient la possibilité, mais que le système des blocs distincts soit abandonné.

Émilie Rive

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