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Droits de l'homme : un élan spontané à préserver

Vendredi, 29 Juin, 2012
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Samuel Thomas: "Les gens ne veulent pas rester passifs."

Les associations sont assaillies d'adhésions et de propositions d'aide.

 

 

Par Marie-Joëlle GROS

mardi 07 mai 2002

 

Au lendemain du second tour, Amar Thioune, président de SOS Racisme à Grenoble, est fatigué mais confiant. Il accueille encore aujourd'hui des visiteurs qui se présentent spontanément dans les locaux de l'association. Aux murs, aux plafonds, il y a des quantités de banderoles, témoignages de l'effervescence de ces derniers jours. La section grenobloise compte 114 nouveaux adhérents depuis le 1er mai. «Les jours qui viennent vont servir à tout remettre à plat. Depuis le premier tour, on ne savait plus où donner de la tête. Le sang neuf est là. On se réunit cet après-midi pour analyser ce qui s'est passé.»

Les gens se sont tournés vers l'association antiraciste comme par réflexe. Dans les cortèges de manifestants, à Paris ou en province, la main de SOS a refait surface. Des mains en milliers d'exemplaires. Collées sur un vêtement, un carton, au bout d'un bâton. Assaillie de demandes, face à un afflux «inouï» de gens, venus chercher «cet identifiant très simple, qui permet de dire son camp et de s'associer à un discours de tolérance», l'association en a fait fabriquer 150 000. Affichettes, autocollants, parfois déclinés en bleu-blanc-rouge. Et maintenant ? «Les gens ne veulent pas rester passifs, explique Samuel Thomas, du bureau national. La situation s'est complètement inversée. D'ordinaire, SOS Racisme reçoit des appels à l'aide. Là, ce sont les gens qui se proposent tous les jours de nous aider.» Pour maintenir le rythme, l'association multiplie les rendez-vous : conseil national extraordinaire ce week-end, projet d'une université d'été en Vendée, dès que les examens étudiants seront passés... «Plus on est nombreux et plus on va pouvoir toucher du monde dans les quartiers, sur les marchés.» La campagne pour les législatives a commencé.

Bénévoles. A la Ligue des droits de l'homme, la priorité est à la montagne de courrier. «C'est arrivé de partout. Pour adhérer, pour faire du bénévolat... Ce n'est pas si simple, il faut savoir encadrer les bonnes volontés», explique-t-on. Il faut encore repérer les initiatives nées ici et là. Et ne pas laisser les gens repartir dans la nature, comme ces manifestants isolés qu'on a vu se glisser dans les rangs des ligueurs : sans en être, juste par sympathie. Cette semaine, des membres de la ligue ont pour mission de suivre de près les nouveaux venus, de leur consacrer du temps. Une section «jeunes» s'est montée très vite à la Sorbonne. A Créteil, autre naissance, tous âges et milieux confondus. Le danger : «laisser ramollir cet élan spontané».

Tissu. Dimanche, à Vitry-le-François (Marne), les militants de la Licra (Ligue internationale contre le racisme et l'antisémitisme) et de Ras le Front ont pris un nouveau coup de massue. Le Front national y a obtenu 27 % des voix. Dans la région, le tissu associatif est surtout concentré «sur la défense des vieilles pierres», explique Philippe Comby, vice-président régional de la Licra. «Le combat antiraciste y est plus difficile qu'à Toulouse ou Marseille». A Châlons-en-Champagne, l'association n'a dénombré que deux nouvelles adhésions. Mais, en une semaine, les sympathisants de la Licra sont descendus trois fois dans les rues. A Reims, à Châlons, et à Vitry. «Les jeunes ont une vraie compréhension de l'antiracisme et de sa nécessité, poursuit Philippe Comby. Ensuite, vers 30-40 ans, ça se gâte. Nous devons redoubler notre présence dans l'insertion, la médiation. Il y a beaucoup de boulot». Diagnostic partagé par le président de la Licra : «Il faut tendre la main aux associations locales, dit Patrick Gaubert. Celles qui ne sont pas connues, qui manquent de moyens. C'est en créant un tissu dense, en dialoguant qu'on pourra faire bouger les choses.»

Thérapie. Réfléchir à l'organisation d'un barrage local : le Mrap (Mouvement contre le racisme et pour l'amitié entre les peuples) y pense aussi. Pour démonter l'amalgame «insécurité-immigration». Depuis quinze jours, le Mrap a été littéralement «assiégé». Volonté de ne pas rester les bras croisés, de se délivrer d'une angoisse. «C'était comme une thérapie : un besoin de parler, de nommer les choses». Le téléphone a sonné en continu, les e-mails se bousculaient... «Malgré les efforts des associations, des syndicats, des sportifs, des églises, des médias, des personnalités pour expliquer ce qu'est le FN, il y a eu un vote d'adhésion, un vote en connaissance de cause. Donc un vote profond. C'est celui-là qu'il faut combattre, explique Mouloud Aounit, le secrétaire général du mouvement. Faire un travail de dentellière, personne par personne, groupe par groupe. On est condamnés à réussir.».

 

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