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LES DISCRIMINATIONS A L'EMBAUCHE NE FAIBLISSENT PAS, SELON SOS RACISME

Lundi, 21 Mars, 2005
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Samuel Thomas: « la réalité des changements de pratiques n’a pas lieu. Le phénomène des fichiers ethniques perdure"

Un rapport sur l'action judiciaire de SOS Racisme contre les discriminations à l'embauche a été rendu public le 21 mars 2005, journée internationale consacrée à la lutte contre le racisme. Si l’association a obtenu plusieurs condamnations d’entreprises, elle observe cependant que peu de progrès ont été réalisés dans la lutte contre le racisme à l’embauche depuis que la question fait l’objet d’un débat public.



Les discriminations à l'embauche ne faiblissent pas, selon SOS Racisme

 


 

 

 

Ikea, Monoprix, Adecco, le Moulin Rouge…Plusieurs groupes à forte notoriété figurent dans le rapport de SOS Racisme, à côté de PME artisanales ou de commerce de détail. Souvent, les auteurs de discriminations renvoient la responsabilité de leurs actes sur leurs clients, soit parce qu’ils ont voulu «satisfaire leur demande», soit pour « l’anticiper ». Les métiers en contact direct avec la clientèle sont le plus touchés par des demandes de type « BBR » (pour Bleu Blanc Rouge), ou « français pure white ». Une agence d’hôtesses, par exemple, pratique ce type de recrutement. Le rapport cite l’exemple de l’agence Daytona, située à Levallois-Perret, dont les plaquettes internes destinées aux DRH régionaux portent la mention « nationalité française et pure white ». « Pour sélectionner ses intérimaires en fonction de leur couleur de peau, Daytona a mis au point une code spécifique – « O » 1 pour origine européenne, « O » 2 pour origine maghrébine, « O » 3 pour « noirs », etc-. 
La discrimination s’exerce aussi pour la vente par téléphone… La société Impact Marketing à Lyon a par exemple pour consigne de recruter uniquement «des personnes ayant un nom français, italien ou espagnol ». Dans le secteur du marketing, «les entreprises cherchent des salariés capables d’anticiper les comportements des consommateurs. Certaines entreprises pensent qu’un bon responsable marketing doit être originaire de  

 

LA HAUTE AUTORITÉ DE LUTTE CONTRE LA DISCRIMINATION

 

 



Toute personne s’estimant victime de discrimination en France peut désormais saisir par écrit la Haute Autorité de lutte contre les discriminations et pour l’égalité (HALDE).
Son adresse :
Haute Autorité de lutte contre les discriminations et pour l’égalité (HALDE)
11-15 rue Saint Georges
75009 Paris

Créée fin 2004, elle entrera vraiment en fonction le 1er juin 2005. A partir de début avril, un téléphone : 08 1000 5000 (coût local à partir d'un poste fixe) permettra de donner des renseignements.

 

 

 

 

France Métropolitaine depuis plusieurs générations pour bien connaître le comportement français en matière de consommation », explique le rapport. C’est ainsi que le groupe BASF, dans une annonce publiée en interne, précisait le profil des candidats à ce type de poste en indiquant la mention «french native». Le rapport regorge d’exemples similaires, la technique la plus souvent employée étant celle du fichier codé, électronique ou manuscrit…Les intranet des entreprises, sur lesquels circulent les offres d’emploi,  fournissent également des preuves de discriminations. Parfois, il arrive que ces offres soient envoyées…par fax. SOS Racisme cite par exemple le cas d’Adecco Districom, qui cumule les critères discriminants dans un fax demandant « des jeunes femmes de 18 à 22 ans, taille 40 maxi, BBR » pour des emplois d’hôtesses de vente.

« Pas de réels changements dans les pratiques »

L’association recourt à différents moyens pour recueillir ces preuves : huissiers de justice et inspecteurs du travail sont en effet habilités à saisir les fichiers internes et à vérifier les témoignages recueillis par SOS Racisme. La méthode du testing, qui consiste à envoyer deux CV semblables, l’un avec un nom à consonance étrangère et l’autre avec un nom typiquement français se révèle également efficace pour « établir des flagrants délits de discriminations », selon l’association. Reste ensuite à convaincre les victimes de porter plainte, ce qui n’est pas toujours facile. Par peur de représailles, du chômage ou de la longueur d’une procédure judiciaire à l’issue incertaine, certaines d’entre elles préfèrent abandonner. Dans les entreprises, c’est parfois la « loi du silence » qui bloque les dossiers. Chez Cegetel, l’inspectrice du travail envoyée par l’association a ainsi découvert que les syndicats, alertés sur une offre d’emploi discriminatoire circulant sur l’Intranet, ont préféré se taire… « Ils auraient renoncé à la cause antiraciste lorsqu’ils ont obtenu une meilleure négociation de l’entrée en vigueur de la loi sur les 35 heures », explique le rapport. Du côté des entreprises incriminées, les réactions varient selon la « culture interne ». « Certaines sont dans le déni, d’autres au contraire mettent en place une politique interne de sensibilisation, explique Samuel Thomas, auteur du rapport de SOS Racisme. La peur du procès est significative, même si les peines prononcées ne sont pas dissuasives. Ikea a été condamnée à 15 000 euros, une somme qui ne représente même  pas 1 heure  de son chiffre d’affaires. Aux Etats-Unis , ce type de condamnations se chiffre en millions de dollars ».
Les réactions des entreprises condamnées sont parfois extrêmes. La gérante d’un magasin a ainsi ouvertement revendiqué sa politique discriminatoire lors de son procès. Chez Ikea, c’est davantage le déni qui règne, « les dirigeants se sont totalement déchargés sur leurs subordonnés, explique SOS Racisme. Ils sont parvenus à convaincre le tribunal qu’ils n’étaient pas responsables des actes discriminatoires commis par les salariés de la société ». L’agence Adecco, chez qui SOS Racisme a saisi des fichiers éthniques, avait pour sa part pris des engagements, mais il s’est avéré que les pratiques discriminatoires ont ensuite perduré.

Quoi qu’il en soit, la multiplication des actions judiciaires engagées par SOS Racisme semble jouer un rôle d’alerte parmi les employeurs. Plusieurs entreprises ont en effet été condamnées au pénal et certains employeurs se sont vus infliger des peines de prison. Mais l’association estime que « la réalité des changements de pratiques n’a pas lieu. Le phénomène des fichiers ethniques perdure, explique Samuel Thomas. Certaines entreprises embauchent des minorités visibles mais continuent par ailleurs à pratiquer les discriminations à l’embauche pour d’autres postes ».
Le rapport a été remis le 21 mars à la Haute autorité de lutte contre les discriminations, dirigée par Louis Schweitzer, l’ancien PDG de Renault.

 

Véronique Smée
Mis en ligne le : 21/03/2005

 

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