Aller au contenu principal

egal.fr

 banniére

Quand les discothèques choisissent

Mercredi, 23 Février, 2005
Logo

C'ÉTAIT EN AVRIL 1999, devant le tribunal correctionnel de Tours. Pour la première fois, une boîte de nuit était condamnée pour discrimination à la suite d'une opération de testing organisée six mois plus tôt par SOS Racisme. La méthode de l'association est simple : faire se présenter à l'entrée d'une discothèque un homme ou un couple d'origine étrangère et observer l'attitude des videurs.

Quand les discothèques choisissent

C'ÉTAIT EN AVRIL 1999, devant le tribunal correctionnel de Tours. Pour la première fois, une boîte de nuit était condamnée pour discrimination à la suite d'une opération de testing organisée six mois plus tôt par SOS Racisme. La méthode de l'association est simple : faire se présenter à l'entrée d'une discothèque un homme ou un couple d'origine étrangère et observer l'attitude des videurs.

Des témoins, parfois un huissier, sont là pour regarder la scène et relever si l'établissement refuse certains clients en raison de leur couleur de peau. L'article 225-2 du Code pénal prévoit trois ans d'emprisonnement et 45 000 d'amendes pour un délit de discrimination. Dans les faits, les peines prononcées se limitent à de courtes périodes de sursis et à quelques milliers d'euros.
« La baisse est sensible, mais il reste un travail énorme » En un peu plus de cinq ans d'actions de ce genre, SOS Racisme a déjà fait condamner 23 boîtes de nuit partout en France. L'impact financier de ces décisions de justice et la contre-publicité médiatique qui les accompagne semblent peu à peu faire évoluer les mentalités. Alors que, au début des grandes opérations de testing, près de trois établissements sur quatre étaient pris en flagrant délit de discrimination, ils ne sont « plus » aujourd'hui que 40 % à se faire prendre sur le fait. « La baisse est sensible, mais il reste un travail énorme », souligne un responsable de SOS. D'autant plus que les tribunaux français adoptent des positions très diverses d'une juridiction à l'autre. Mardi dernier, le tribunal correctionnel de Lyon a relaxé onze videurs de boîtes jugés pour discrimination raciale. Pourtant, à l'audience, le procureur avait requis deux mois d'emprisonnement avec sursis et 500 d'amende contre les portiers. Le magistrat avait souligné que « ces actes de discrimination réduisent l'individu à sa seule appartenance communautaire et aux préjugés sur sa couleur de peau », avant de préciser qu'« on ne reproche pas aux prévenus d'être racistes, mais c'est l'attitude discriminante qui est visée ». Malgré cet argumentaire, les videurs ont donc échappé à toute sanction. SOS Racisme vient de décider de faire appel.
Des problèmes similaires dans l'administration et les transports publics Au-delà de cet épisode lyonnais, Samuel Thomas, vice-président de l'association, estime qu'une « grande partie de la magistrature est réticente » à s'engager dans ce genre de procédure (lire interview page 13) . « Les instructions de ces affaires qui sont pourtant assez simples peuvent durer trois à quatre ans », regrette-t-il, soulignant que, selon lui, « seul un tiers des affaires débouchent sur un procès suivi de condamnation ». Reste que ces combats judiciaires, gagnés ou perdus, ont un retentissement et que la lutte contre les discriminations est un sujet de préoccupation au-delà du monde associatif. C'est ainsi qu'à la fin décembre l'Assemblée nationale puis le Sénat ont voté la création d'une « Haute Autorité de lutte contre les discriminations et pour l'égalité ». Cette instance, qui devrait voir le jour dans le courant du premier trimestre, sera composée de onze membres chargés d'aider les victimes à faire valoir leurs droits à réparation. Toute personne s'estimant victime d'une discrimination pourra la saisir, seule ou avec l'appui d'un parlementaire. Un nouvel outil qui permettra notamment de se pencher avec plus de facilité sur les problèmes rencontrés dans l'administration ou les transports publics.

Publier un nouveau commentaire

Le contenu de ce champ sera maintenu privé et ne sera pas affiché publiquement.